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10 août 2011 3 10 /08 /août /2011 17:51
Pourquoi dormir à l'hôtel ?

Clara préférait dormir dans les hôtels quand elle travaillait, ce que je ne comprenais pas, car j'aimais la chaleur humaine des maisons d'hôtes.

Depuis lors j'ai compris. A l'hôtel on est libre, indépendant, il y a un restaurant où l'on dîne tranquillement, même s'il n'est pas toujours excellent, et surtout, à l'hôtel il n'y a pas mensonges à faire, pas de situations fausses ou l'on se sent indiscret et fourbe.verrière 2 001 °°

Quand on dîne avec les hôtes à leur table sans qu'ils sachent qui nous sommes et que l'on doit discuter avec eux, on marche sur des oeufs. Il est à supposer que le choc de la "révélation" du lendemain, après le paiement de la facture leur fasse oublier tous nos propos de la veille, mais sur le moment, c'est inconfortable. Avec les hôtels les relations sont de professionnels à professionnels.

Avec les maisons d'hôtes, l'attachement que les propriétaires portent à leur maison, la charge affective peut parfois nous peser d'une trop lourde pression, d'autant qu'à l'époque où j'ai commencé notre guide avait peu de concurrence et certaines maisons nous ont dit faire aux alentours de 70 % de leur chiffre d'affaires grâce à leur présence dans le guide.

cheminée 001





D'où... le pouvoir.

Utilisé, j'ai pu le constater au cours des années, trèsdiversement par les visiteurs. Tous, semble-t-il, se sentent légitimés par le fait de devoir écrire - ou pas - un texte sur les adresses visitées. Texte qui sera publié et donc sacralisé par la magie du papier et de sa pérennité (même si les guides paraissent tous les ans). Voici quelques exemples de la façon dont ils conçoivent l'exercice de ce pouvoir.

La cliente difficile

Caroline faisait la cliente difficile, pour voir comment réagissait les hôtes dans les situations compliquées. C'est une option courageuse mais qui aurait pu être tout à fait efficace si Caroline avait été capable de surcroit de ne pas tenir compte de ses préférences personnelles.

Même si, bien sûr, nous ne pouvons juger qu'à partir de notre ressenti, il convient ensuite d'en faire la part et de se recentrer sur les lecteurs. Nos enthousiasmes comme nos inimitiés* personnelles ne doivent jamais nous faire perdre de vue que ce sont les lecteurs, qui nous font confiance, qui iront dépenser leur argent et leur temps de vacances dans les adresses sélectionnées.


table rouge 001Les deux extrêmes : froid, chaud

Emma quant à elle était froide et ne pipait mot, sauf pour poser des questions techniques (le nombre de mètres carrés et pourquoi cette suite avait un rideau pour entrée et non pas une porte, ...) Elle ne sympathisait pas, par rigueur professionnelle et ne craignait pas de passer pour un glaçon. Eric, était fort sympathique au contraire, et tout le monde l'adorait et se souvenait de ses visites même des années après.

Ce qui ne l'empêchait nullement de ne pas sélectionner des adresses qui ne convenaient pas. Peut-être qu'Emma protégeait sa sensibilité alors qu'Eric soignait surtout l'impression qu'il donnait.  Clara, de son côté, était naturelle, un brin moqueuse par moments, c'est sa nature, mais aimable quoique tout à fait rigoureuse.

Attentive, aux aguets, et ostensiblement timide

Nous formions une équipe, quoique renouvelée en partie chaque année ; nous prenions ensemble les décisions finales et nous peaufinions les textes pour qu'ils donnent un maximum d'informations tout en restant "écrits".

Le style se devait d'avoir une unité mais une des richesses de ces guides étaient l'indépendance des visiteurs-rédacteurs.lampes alluyes (6)

Après avoir absorbé de toutes les façons possibles, même intuitive et inconsciente (est-ce un pléonasme ?) les informations, pris des notes et quelques photos, et donné un "surnom" * à la maison ou au propriétaire, je laissais passer quelques jours avant de mettre les textes en forme - presque- définitive, déjà bien avancé par mes notes (revues chaque soir, à chaud).

Je n'étais pas impressionnante, je le savais, mais il était intéressant de voir la réaction des hôtes en face de quelqu'un qui leur laissait la possibilité de s'imposer. De plus, mon attitude avait l'indéniable avantage de les mettre tout à fait en confiance. Dès ma troisième année j'ai emmené ma fille en tournée, alors âgée de 6 ans, ce qui me rendait insoupçonnable.

Une forme de clairvoyance

Voila quelques échantillons des différentes attitudes que nous avions choisies pour exercer ce métier à la fois "technique" et immanquablement biaisé sur le plan des relations humaines.

La plupart des adresses désiraient vivement entrer (ou demeurer) dans nos guides ; et déroulait facilement le tapis rouge pour cela. Nous avions pour mission de voir sous le tapis.

 

* voir article "enthousiasmes et inimitiés : à surveiller !"

Anne-Sophie Brard

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